Le quantitatif n’explique pas tout dans le champ politique, mais constitue un bon baromètre pour mesurer la qualité des avancées. 2022 en est une. Les femmes n’ont jamais été autant représentées à l’Assemblée nationale.
Par Bernadette SONKO
Symboliques ont été les dernières élections législatives de juillet 2022, riches en rebondissement. Plus de 44 % des sièges parlementaires sont désormais détenus par les femmes. Une avancée notoire qui renforce leur présence à l’Assemble nationale. Élues sous toutes les bannières, elles gagnent deux sièges supplémentaires par rapport à la dernière législature avec 73 élues.
Cette avancée place, désormais, le Sénégal sur la troisième marche du podium en Afrique, derrière le Rwanda avec 61 % des femmes élues et l’Afrique du Sud (46%) et 11e au rang mondial. Les deux autres pays africains figurant parmi les 20 premiers sont l’Éthiopie et le Mozambique. Le Sénégal devance plusieurs pays occidentaux comme l’Espagne, la France, le Royaume-Uni, l’Italie, le Canada, la Suisse ou encore les États-Unis.
La forte présence des femmes à l’Assemblée nationale est le fruit de plusieurs années de lutte consacrées par la loi sur la parité votée en 2010. Elle exigeait la parité absolue dans toutes les institutions électives avec les listes de candidatures alternant femmes et hommes. Le non-respect de cette disposition entraîne l’invalidation de la liste incriminée. Depuis, le nombre d’élues a plus que doublé.
Cette percée en terme quantitatif, certes salutaire, ne demeure pas une fin en soi. Une grande partie des postes stratégiques au sein de l’hémicycle demeure la chasse gardée de leurs collègues députés. Aucune femme n’a encore été élue au perchoir. Leur représentativité reste minime et révèle la longue marche à mener.
De l’administration publique au secteur privé en passant par la santé, l’économie et l’éducation et la recherche principalement, le mouvement est irréversible ! En effet, la forte scolarisation des jeunes filles constatées depuis les années 1990 demeure une constante. Selon l’Agence nationale de la statistique et de la démographie (ANSD), les filles, avec une moyenne globale de 52,2 %, sont majoritaires dans les effectifs du préscolaire au niveau de toutes les régions, à l’exception de Ziguinchor et Sédhiou où les garçons arrivent légèrement en tête.
Toutefois, de fortes disparités émergent à leur entrée dans le marché du travail. Par rapport au sexe, les femmes sont plus affectées que les hommes. Près la moitié (47,4%) des jeunes femmes ne sont ni en scolarisation, ni en formation, ni en emploi contre 18,4% pour les hommes. Les données de l’ANSD montrent également que la sous-utilisation de la main-d’œuvre est plus forte chez les femmes comparativement aux hommes. Représentant près de 51,0% de la population en âge de travailler, elles ne constituent que 43,7% de la main-d’œuvre. Une bonne partie de la population féminine est encore confinée dans l’espace domestique.
La forte présence politique des femmes ne constitue, donc, pas une garantie de l’amélioration de leurs droits, ni de leurs conditions de vie dans la société. Leur combat doit aller au-delà des préoccupations partisanes et leurs voix demeurer audibles pour percer les forteresses dressées par les législations fortement empreintes du sceau patriarcal !