Son rêve de paternité a connu de nombreux revers. Les mariages et divorces ont rythmé sa vie. Fataliste, malgré ses nombreux recours aux ressources médicales moderne et traditionnelle, Samba Guissé semble avoir adopté une résilience soutenue. Récit de vie d’un homme au parcours chargé de déceptions et d’anecdotes !
Par LD
Samba Guissé est un enseignant à la retraite. Il partage, son appartement situé au dernier étage d’un R2, avec ses parents et son épouse. Un salon douillet, composé d’un ensemble de fauteuils, aux textures variées, d’une longue table en marbre dur et d’un écran plat, accueille le visiteur. Un « foyer » parfait à l’entame de son sixième mariage.
Après avoir soufflé ses 62 bougies, Samba Guissé court toujours après son premier “bout de bois de Dieu”. Il s’était marié avec sa cousine à l’âge de 20 ans. Une union dissoute quatre ans plus tard, « convaincu » que cette dernière « n’était pas capable » de réaliser « son rêve de paternité ». Une situation « intenable » pour le jeune enseignant qui préparait son concours d’aptitude.
L’épouse répudiée découvre la maternité et pouponne fièrement. « Une onde de choc » qui remet en cause ses certitudes, mais ne l’empêche pas de se remarier en 1986 avec une collègue. « J’aimais beaucoup Aminata », confie l’instituteur à la retraite, qui au bout de deux ans sans enfant, décida de consulter un gynécologue qui diagnostiqua une « anomalie génitale ». Il avait honte de sa maladie et effectuait ses visites médicales à l’insu de sa femme. Cette dernière qui a toujours été « attentionnée changea, au fil du temps, d’attitude et le quitta ». Un souvenir difficile à oublier.
Samba Guissé s’imposa des années de célibat pour « se soigner ». À 35 ans, il s’engagea dans un quatrième mariage, au moment où certains le surnommaient de « ay gaaf » (le poisseux, le porte-malheur) et d’autres lui attribuaient une « thioro raap » (une femme maléfique jalouse).
En tout cas, il lui est devenu difficile de trouver l’âme-sœur, malgré ses dots faramineuses. Des parents « superstitieux refusèrent de lui accorder la main de leurs filles », confie l’éducateur, le regard absent.
Sans se décourager, il convola avec Astou Ndoye, dans les années 1990, en mettant sous silence son passé infertile. Ce fut « un mariage aussi improductif que les précédents » et finit par confesser le mal qui le « ronge et sape son autorité d’homme ». Des amis l’orientent vers des ressources traditionnelles. À la quête de son “premier bout de bois de Dieu”, Samba Guissé ira jusqu’en Casamance. Mais ses recherches restent infructueuses. La voie spirituelle demeure son dernier recours. « J’effectue beaucoup de prières surérogatoires surtout très tard la nuit. Je jeûne aussi tous les jeudi et mercredi pour implorer Dieu », confesse celui que les riverains appellent affectueusement Père samba.
Depuis huit ans, soit trente années de vie conjugale sans enfant, l’enseignant retraité vit avec une veuve de quarante ans, mère de deux enfants. « C’est mon sixième mariage et ce sera mon dernier ». L’appel du muezzin mit fin à notre discussion pour la prière du soir augurant encore d’une nouvelle traversée nocturne sans ses bouts de bois de Dieu.