Par MF
Au Sénégal, il n’existe encore aucune donnée officielle quantifiant la portée de l’infertilité masculine. Les chiffres de l’Agence nationale de la statistique et de la démographie (Ansd) directement liés à cette pathologie concernent la population féminine et remontent à 2013. L’infertilité primaire touche 4,8% de l’ensemble des femmes et 2,5% des femmes mariées. Aucune donnée n’est reliée à l’infertilité secondaire.
L’infertilité, qui est une affection du système reproducteur masculin et féminin définie par l’impossibilité d’aboutir à une grossesse après 12 mois ou plus de rapports sexuels réguliers non protégés, concerne 48 millions de couples et affecte plus de 186 millions de personnes dans le monde, selon l’Organisation mondiale de la santé (Oms).
Différente de la stérilité qui est un état d’infertilité jugée définitive et totale, l’infertilité peut revêtir deux formes : primaire (lorsque le couple n’a jamais eu d’enfants) ou secondaire (existence de grossesse menée à terme ou à de fausse couche).
Drame social au-delà de sa dimension biologique, cette maladie touche au Sénégal 10 à 15 % des couples selon des données du Groupe interafricain d’études, de recherche et d’application sur la fertilité. 20% sont d’origine masculine et 30% féminine.
L’exposition aux perturbateurs endocriniens présents dans l’environnement quotidien, des troubles sexuels liés à̀ des malformations congénitales ou acquises (dysfonction érectile, troubles de l’éjaculation) ou encore l’âge sont souvent relevés pour expliquer l’infertilité masculine qui est devenue un véritable problème de santé publique dans plusieurs pays à travers le monde.
Une méta-analyse, réalisée à partir de données collectées entre 1973 et 2011 chez les hommes occidentaux (Amérique du Nord, Europe, Australie, Nouvelle-Zélande), révélait en 2017 que la concentration de spermatozoïdes dans le sperme a diminué́ de plus de 50 % en moins de quarante ans, soit une diminution de 1,4 % par an.
Ce résultat est corroboré par une étude de Santé publique menée en France en 2018. Entre 1989 et 2005, une observation auprès de l’échantillon masculin montre une baisse significative et continue de 32,2 % de la concentration spermatique, soit une diminution annuelle d’environ 1,9 % par an.
En l’absence de données officielles au Sénégal, la référence scientifique la plus récente est la thèse intitulée « Infertilité masculine : contribution à la connaissance des mécanismes physiopathologiques de l’infertilité masculine » présentée par Mané Dione en 2021 à la Faculté de médecine, de pharmacie et d’odontologie de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (Ucad). Elle déchiffre un terrain encore méconnu dont les avancées médicales sont peu poussées au Sénégal, mais aussi dans les autres pays.
De véritables enjeux entourent la question de l’infertilité masculine en dehors des conséquences sociales dramatiques. Selon Dre Dione, « la santé reproductive de l’homme est devenue un sujet de santé publique » dans une société qui valorise la paternité.
Les recherches suscitent des espoirs au sein de la communauté médicale. Toutefois, beaucoup de couples souffrent ou ne parviennent pas à déployer les mécanismes de défense nécessaire pour résister aux assauts des agents responsables de cette pathologie.