Par MF
Depuis quelques années, j’engage une femme qui entretient mon appartement deux fois par semaine. Mère de cinq enfants, elle a presque la soixantaine. Je l’ai connue par le biais d’une relation. Elle a beaucoup d’expérience : 30 ans dans le domaine. Trente années de totale précarité !
Avant, elle logeait chez sa patronne et ne rentrait dans sa famille qu’un weekend sur deux. Sa journée commençait avec l’appel du muezzin pour la prière du matin et se terminait après le coucher de toute la maisonnée vers 22h. Elle regagnait son pantéré jonché et dormait à même le sol. Elle n’avait même pas le droit de partager le repas qu’elle a préparé pour les sept membres de la famille et percevait 75 000 Fcfa par mois.
Au Sénégal, le volume horaire n’est pas quantifié. Les aides à domicile communément appelées Bonnes travaillent des journées entières pour une paie de misère. Leur temps de travail n’est pas pris en compte lors de la négociation de leurs conditions.
En discutant avec une amie militante pour une prise de conscience de la situation précaire des aides à domicile, mon étonnement fut total ! Elle m’a dit de ne pas dérober le sol sous les pieds des femmes. Pour sa part, à la veille des fêtes, elle offre un bonus à la sienne pour les fins de semaine où elle est restée lui surveiller sa maison, le temps qu’elle vaque tranquillement à ses activités.
Et dire, que nous nous battons quotidiennement pour promouvoir les droits des femmes. Mais quels droits ? Et pour quelle catégorie de femmes ? En tout cas, pas celles qui travaillent dans l’ombre pour nous permettre de se libérer des tâches domestiques qui nous incombent.
Et pourtant, quand elles tombent malades, elles perdent leurs salaires. Quand elles prennent congé, elles perdent leurs revenus. C’est bien d’acheter leurs ordonnances, de les soutenir dans des moments difficiles, de leur faire des cadeaux à la veille des fêtes ou de faire des dons à leurs enfants ou leurs parents. Mais, cela ne suffit pas !
Je ne nie pas que ce travail est essentiel pour ces femmes, afin de subvenir à leurs besoins ou à ceux de leur famille. Mais, je vis un malaise. Je dirai même un dilemme moral. Pour dire vrai, je me sens coupable et me demande comment peut-on promouvoir les droits des femmes et employer une aide à domicile dans des conditions inhumaines ? Cette relation est-elle morale ? Ne sommes-nous pas en train de reproduire dans nos maisons ce que nous combattons ?
Les conditions de travail de ces aides à domicile, sans oublier les abus de toute sorte, sont une plaie pour les femmes. Engageons-nous à formaliser ce métier difficile qui use nos sœurs et les asservit au service d’autres femmes. C’est de notre responsabilité en tant que femmes et au nom de toutes les femmes de valoriser ce travail avec des paies viables, des cotisations sociales, une prise en charge médicale adéquate, pour être crédibles !
Ca m’a toujours pose un probleme. On ne peut pas liberer les femmes en s’appuyant sur l’asservissement d’autres femmes.
La solution c’est un partage equitable des taches dans le foyer et un cadre reglemente pour le travail d’aides a domicile.