Par Bernadette SONKO
La scène intenable de la députée sénégalaise giflée au sein de l’Assemblée nationale soulève plusieurs interrogations. Au-delà de l’indignation collective, elle repose les complexes questions sociétales qui ont forgé et qui continuent à fomenter les représentations sociales de notre pays.
Inimaginable, en effet, de voir pareille réplique apportée à un député. Le discours et ses représentations sont encore statiques face aux dynamiques institutionnelles. Les portées langagières d’un homme et d’une femme ne sont pas pareilles. Il ne s’agit pas de valider les invectives ou insultes qu’aucun(e) citoyen(ne) ne doit promouvoir. Toutefois, une femme ne saurait parler, discuter, gesticuler ou parodier comme un homme…
Les représentations confinent la rhétorique féminine dans l’espace domestique, marchand ou ludique. Son discours doit être soft, sensuel, réconfortant. L’arène politique, quoique démythifiée par des pionnières comme Caroline Faye, Adja Arame Diène, Léna Fall Diagne, Fatoumata Ka (…), demeure encore fortement masculine. Et pourtant, ces ‘’dames’’ du parti, sobriquet revendiqué à l’époque, ont fortement contribué à solidifier les assises démocratiques, voire partisanes, en imposant une diversité dans cette agora masculine.
Les femmes doivent refouler leur parole dès lors qu’elles empruntent le champ de la revendication politique ou syndicale. Une symphonie contestatrice qui se veut virile et réservée au ton masculin. Les stéréotypes verbaux existent et se déploient à tous les niveaux. Aussi, les femmes doivent-elles, pour y arriver, faire preuve de finesse, de tact, et déployer tout leur arsenal au féminin.
Les rhétoriques féminine et masculine existent. Leur construction figée moud encore les représentations dans une logique de domination bipolaire (homme-femme). Elles ne doivent légitimer ou garantir une quelconque privation ou asservissement. Leurs différences sont perceptibles d’une région à l’autre, du village manding au diola en passant par le wolof. Les voies qui y mènent ne sauraient confisquer les voix des femmes qui ont fini par forger l’imaginaire collectif de tout un pays.
La violence n’a pas de genre. Sa représentation ambivalente assigne et perpétue. Elle est devenue banale et sans identité. Il faut juste la combattre en sevrant sa racine par les sèves préventive et éducationnelle !